



© Musée du Louvre / Pierre Philibert
Jean-Antoine Houdon (1741 - 1828)
1790
Bronze
192 x 90 cm
Paris, Musée du Louvre, inv. n°CC 204
Diane Chasseresse
Cette sculpture en ronde bosse est réalisée par Jean-Antoine Houdon, sculpteur membre de l’Académie, rattaché au mouvement néo-classique. Elle est issue d’une première commande passée par le duc de Saxe-Gotha : le sculpteur exécute un premier modèle en plâtre en 1776. Ce n’est qu’en 1780 que la statue de marbre est achevée, finalement achetée par l’impératrice de Russie, Catherine II. Houdon en coule par la suite trois bronzes dont celui acquis par le Louvre à son décès, qui avait été exposé au Salon de 1790.
Un mouvement divin
Représentée grandeur nature, cette très belle femme nue n’est autre que Diane, la déesse romaine de la chasse. Reconnaissable à ses attributs, l’arc et la flèche qu’elle tient dans chacune de ses mains, elle est coiffée d’un croissant de lune, astre auquel elle est généralement associée. Le visage légèrement tourné sur la droite, elle arbore une expression neutre, qui trahit une certaine fierté de la part de cette déesse connue pour son caractère sauvage et qui a fait voeu de chasteté.
Effleurant le sol plutôt qu’y posant véritablement son pied gauche, elle semble saisie en plein mouvement, avançant d’un pas aérien que Houdon lui-même caractérise de “marche aisée”. Sa jambe droite est suspendue en arrière, et Diane ne tient que sur la pointe de son pied gauche, créant ce pas si délicat. L’impression d’un équilibre fragile, que la version en marbre ne parvient pas à égaler, est permise par le matériau. La technique du bronze fondu rend en effet la sculpture bien plus légère et permet à l’artiste de réduire les appuis à leur minimum, comme l’avait déjà fait avec audace Giambologna pour représenter un autre dieu latin, Mercure volant. La posture adopte ainsi un caractère irréel traduisant la divinité de Diane.
Une beauté un peu trop parfaite
Diane est une figure récurrente dans l’histoire de l’art occidental où on la connaît dans deux iconographies principales. Celle de la “Diane chasseresse” et celle de la “Diane au bain” : traditionnellement, la première est représentée vêtue d’une tenue courte, le chiton, selon le modèle de l’Artémis tandis que la seconde est nue, comme en témoigne la version sculptée en 1778 par Christophe-Gabriel Allegrain. Houdon rompt pourtant avec cette habitude en dénudant sa Diane chasseresse, afin de montrer un corps à la beauté parfaite, véritable écho au canon antique. Au cours du XVIIIe siècle, le néo-classicisme prône en effet le retour à l’esthétique antique : les excès de frivolité et les mœurs légères sont condamnés tandis qu’en art, la perfection formelle est assimilée à la pureté blanche et aux proportions parfaites des statues grecques et romaines. La Diane de Houdon offre ainsi au regard ses formes idéales, au contour linéaire fin, dans un bronze impeccablement poli.

Artémis, déesse de la chasse
IIe siècle ap. J.-C.
Marbre
2 m
Paris, Musée du Louvre
© Musée du Louvre / Thierry Ollivier
L’œuvre fait pourtant scandale lorsqu’elle est exposée au Salon en 1780 : l’artiste, à vouloir montrer une beauté parfaite, en montre trop pour le goût de l’époque ! Son sexe exposé au yeux de tous est jugé trop naturaliste rendant la sculpture indécente. Il est finalement rebouché et martelé en 1829 lorsque la statue est achetée par le Louvre.

© Musée du Louvre / Thierry Ollivier
Mercure volant
Jean de Bologne (1529 - 1508)
1574
Bronze
1,80 m
Paris, Musée du Louvre

© Musée du Louvre / Pierre Philibert
Diane au bain
Christophe-Gabriel Allegrain (1710 - 1795)
1778
Marbre
1,70 m
Paris, Musée du Louvre

© Ricardo Oliveira Alves
Diane chasseresse
Jean-Antoine Houdon (1741 - 1828)
Marbre
1780
Musée Calouste-Gulbenkian, Lisbonne
Un pas plus loin ...
Pour sa version de 1780 en marbre, Houdon ne peut se permettre le fragile équilibre qu’il a en tête pour sa Diane : la pierre trop lourde ne lui permet pas de suspendre la déesse dans sa “marche aisée”. Il est contraint de caler son pied gauche et doit encore sculpter un feuillage et un carquois de flèches sur son côté gauche, rattachés respectivement à sa jambe et à son bras. Ces éléments dissimulent ce qu’on appelle des ponts et consolident ainsi de façon esthétique le bloc de marbre. Dans l’Artémis, dite Diane de Versailles, la biche (qui est un autre attribut de la déesse) remplit la même fonction. Cette astuce courante est également visible dans une autre sculpture de l’exposition, l’Atalante de Pierre Lepautre.